Au delà du manque
30 septembre 2018 - 24x
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Peut-être n’est-ce qu’une impression, mais il me semble toujours que les mauvaises habitudes sont plus faciles à prendre qu’à perdre ! J’ai eu de nombreuses occasions de constater à quel point les petits palliatifs que nous mettons en place pour combler un vide, un manque, peuvent devenir des réflexes tenaces, et parfois même des addictions. Il devient alors si dur de renoncer au pouvoir magique de la télécommande quand le petit écran répond sans délai à un sentiment de solitude. Si compliqué de cesser de manger dès qu’on est stressé ! Et par quoi remplacer ce petit verre tardif qui donne l’impression de mieux affronter l’angoisse de la nuit, l’incertitude de l’existence ?
Le changement peut faire reculer, même si on le désire ardemment. Précisément parce qu’on sait ce qu’on perd mais qu’on n’a pas encore la conscience claire de ce qu’on gagne. Bien souvent, la personne qui rêve de se débarrasser d’une habitude bien ancrée ne se représente que l’absence de la béquille qu’elle s’est créée pour surmonter une situation. Un peu comme le fumeur ne peut qu’envisager avec horreur ne plus fumer tant qu’il se représente cet état comme celui du manque perpétuel et éternel. Mais avec une méthode adaptée, avec du temps, et parfois après quelques rechutes qui font partie du parcours, alors on commence à goûter le fruit des efforts.
Passée la période de sevrage, quand il s’agit d’une addiction, ou du moins une période d’inconfort plus ou moins grand – tout dépend de quoi on parle – la personne cesse de ressentir le manque. La paix peut enfin l’habiter, une tendance qui était devenue une souffrance peut être remplacée par une autre expérience, positive celle-là. Bien sûr, en fonction de notre vécu, il faudra peut-être se protéger, prendre quelques dispositions pour éviter la récidive – comme on le dit pour ceux qui sortent de prison.
Dans la vie, il vient toujours le moment où on s’aperçoit qu’il y a un écart entre l’idéal et la réalité. Dans cet écart se sont glissées, entre autres, ces habitudes qui nous font du mal (parfois pas toujours, ou pas sur le coup, il est vrai). Ces habitudes dont on sait ce qu’elles nous apportent… tout en reconnaissant qu’elles ne sont pas à la hauteur de ce qu’on aimerait vivre. Changer ? Oui, merci, mais comment ? Chacun a sa méthode : radicale ou progressive, avec un accompagnement médical et/ou spirituel… J’ai envie de dire : peu importe, car qui peut prétendre détenir les recettes de la vie ?
Ce dont je suis convaincue, c’est que Dieu n’exige pas de nous que nous nous amputions – fut-ce d’une mauvaise habitude – pour nous laisser avec le manque, l’absence, la fébrilité et le désarroi engendrés. Là où l’être humain est plus royaliste que le roi, là où il est moraliste et moralisateur, Dieu voit plus loin que sa propre loi : il désire que ses enfants, puisque c’est en ces termes que la Bible parle de nous, gagnent la paix, le bien être si possible, une espérance qui fait qu’on n’est pas limité à l’ici et maintenant. En un mot : qu’ils soient libres ! C’est ce que dit l’apôtre Paul dans sa lettre aux membres de l’église de Corinthe : « Là où est l’esprit du Seigneur, là est la liberté » (2 Corinthiens 3.17).