Coup de canif dans le contrat cherche bonne conscience
28 janvier 2018 - 20x
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Le langage est subtil. Vous avez sans doute déjà entendu parler du « petit coup de canif dans le contrat ». Ce petit accro de rien du tout, invisible à l’œil nu, qui ne suffit pas à déchirer ledit contrat et donc… ne fait de mal à personne. C’est ainsi qu’on désigne communément les histoires extra-conjugales mais cette expression conviendrait aussi très bien à ces centaines de micro-déchirures dans nos relations : avec un ami, dont on a un peu (un peu seulement) profité ; un collègue, envers qui on a manqué de loyauté ; un parent à qui on n’a pas dit toute la vérité… L’art du langage nous permet, grâce à un grand choix de mots et de figures de style, d’amoindrir les conséquences de nos actes et de considérer certaines erreurs comme négligeables. Nos petits arrangements en costume peuvent ainsi tranquillement se rendre au bal de la bonne conscience et trouver leur place auprès de nos désirs et de nos volontés légitimes.
Dans les faits, il y a certes des agissements, des décisions ou des paroles plus graves que d’autres. Mais dès lors que nous avons recours aux artifices de la langue pour en réduire (ou en exagérer aussi, d’ailleurs) la portée, nous ne sommes plus en paix avec nous-mêmes. Le problème n’est pas de l’ordre du langage mais bien de notre conscience, soumise au silence par quelque habile tournure. Nos expressions masquent autant qu’elles marquent l’écart entre notre morale et nos actes. Et ce, quelle que soit la frontière que nous traçons entre bien et mal. Que l’on soit croyant ou pas, qu’on place la limite un peu plus à droite ou un peu plus à gauche, que nous partagions ou non telles ou telles valeurs, nous avons tous une conception du bien et du mal, et nous faisons tous passer une ligne de démarcation entre les deux.
Nos tournures de phrases sur le mode du « petit coup de canif dans le contrat » servent à nous auto-déculpabiliser dans les cas où cette ligne est franchie sans trop de dommages apparents. Cela est préjudiciable, et pas seulement si nous sommes croyants et que nous nous regardons dans le miroir de Dieu. Cela est préjudiciable parce que dans le fond, notre conscience ne se laisse acheter par aucun euphémisme mais surtout, en évitant de considérer nos actes pour ce qu’ils sont, nous passons à côté de la possibilité de changer. Peut-être que certains n’en ont aucune envie, de changer, et s’estiment très bien comme ils sont. Pour moi, refuser de changer, ce serait comme traverser la vie en ayant pris l’autoroute tout du long, sans jamais avoir essayé d’autre chemin.
Comme modifier sa direction est parfois difficile et peut nécessiter de regarder en face, d’assumer, de vrais grands coups de poignards dans le contrat, voire un contrat en miettes, un contrat raturé, un contrat tâché de sang, Jésus est venu témoigner de son amour pour les pécheurs que nous sommes, sans hiérarchiser nos fautes. Cet amour inconditionnel, c’est la base, c’est le tremplin qui nous permet d’accéder à un pardon qui libère. Dieu met cet amour et ce pardon à la disposition de toute personne qui reconnaît en avoir besoin.