J'assume
25 juin 2017 - 23x
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Il y a des expressions « tendance » comme il y a des vêtements, des couleurs, des matières et des formes « tendance ». Oui, le langage aussi a sa mode ! Je suis sûre que nous avons tous remarqué et utilisé des termes comme « y’a pas de souci » ou « c’est juste génial ». Depuis quelques temps, c’est comme si la collection s’était enrichie d’un nouveau modèle : « j’assume ». Voilà une bonne formule pour clore le bec à un interlocuteur dont les propos viendraient déranger ma petite routine !
Mais un usage abusif conduit toujours à usure précoce. Ainsi, l’effet de ces expressions « tendance », censées mettre l’emphase sur une idée, finit par s’éroder. Là où on voulait porter l’accent, on finit par faire simplement sourire. C’est encore plus vrai et encore plus gênant avec ce « j’assume », qui nous implique personnellement. Assumer, c’est regarder dans les yeux une réalité qui est difficile à porter ; une vérité qui déplaît ; un passé qu’il est trop tard pour changer. C’est accepter d’endosser sa part de responsabilité et, comme la vie avance, accepter d’avancer avec elle.
Distribuer du « j’assume » à tout bout de champ en espérant asséner une réponse définitive qui me débarrasse des gêneurs, c’est galvauder cette expression. Non seulement c’est en abuser mais cela masque souvent un refus de se remettre en cause, sans pour autant avoir réfléchi à ce qu’assumer implique à ce moment précis. Sous couvert d’assumer, on endosse en fait des responsabilités au rabais qu’on ne s’est pas donné la peine de peser. On se dérobe au reproche et on échappe à la remise en question. A quel prix ? Souvent celui de se détourner d’autrui pour mieux continuer à servir nos intérêts, à écouter notre bon plaisir, à suivre notre habitude...
Quand j’entends un « j’assume » faire écho à cela, je dois dire que c’est un peu comme si j’avais mal. Et j’ai d’abord mal pour la personne qui le dit, si j’ai l’impression qu’elle se défile dans ce travers de langage. Si finalement, sa façon d’assumer est de mieux se voiler la face devant une réalité : « j’assume », autrement dit « je ne me pose pas de question, je ne regarde ni à droite ni à gauche – encore moins en arrière – et je continue ma route sans autre considération ». C’est la meilleure méthode pour avancer sans avancer ! Pour faire du kilomètre dans la vie sans cheminer intérieurement.
La Bible est pleine de personnes qui sont parties loin pour se trouver et connaître Dieu, mais aussi de gens qui, sans jamais quitter leur village natal, ont parcouru une route qui les a changés à tout jamais. Pour vivre ces expériences qui transforment, tous ont accepté ce qu’ils étaient : sourds, muets, aveugles, paralysés, au sens physique mais aussi psychique, émotionnel, spirituel… Ils n’ont pas dit : « j’assume » d’un ton désinvolte. Sinon, rien ne se serait passé. S’il y a une chose qu’ils ont assumée, c’est le choix de se laisser toucher (dans tous les sens du terme) par Dieu ou par son fils, Jésus. C’est un choix qui n’a pas toujours été bien accueilli autour d’eux. Mais c’est ainsi qu’ils se sont mis en route pour un voyage qu’il aurait été impossible de réaliser autrement.