On ne naît pas intègre, on le devient
09 décembre 2018 - 28x
Partager
La grogne des gilets jaunes ; plus loin de nous, au Japon, l’incarcération de Carlos Ghosne, le PDG de Renault-Nissan qui a omis de déclarer une bonne partie de ses revenus ; l’élection d’Emmanuel Macron comme président d’une République qui se veut exemplaire… L’actualité est pleine de cette question qui n’est jamais posée : qui est intègre ? qui peut être considéré comme juste ? qui peut imposer une justice sociale ?
L’intégrité, c’est, selon le dictionnaire Larousse, la « qualité de quelqu'un, de son comportement, d'une institution qui est intègre, honnête ». Peu d’entre nous n’ont pas envie d’être considéré comme une personne de qualité, une personne dont le comportement mérite d’être porté en exemple. Pourtant, nombreuses sont les situations qui illustrent le manque d’intégrité autour de nous…
C’est que l’intégrité coûte. Et c’est peut-être ce qui la caractérise, n’en déplaise aux dictionnaires qui se contentent d’en donner une définition objective un peu sèche. Mais l’intégrité ne devient l’intégrité que parce qu’elle se démarque du mensonge et de la corruption qui l’entourent. On ne souligne pas l’intégrité d’une personne qui ne ferait que suivre les standards appliqués partout dans son entreprise, par exemple. Ce n’est pas être intègre que de ne pas voler quand personne ne vole. C’est simplement se conformer à la culture du moment – culture de l’honnêteté, certes. Mais ne pas voler quand c’est la pratique générale et que tout y incite, cela fait entrer dans une autre dimension. C’est là, à mon sens, que commence l’intégrité.
L’intégrité est donc une forme de résistance, à un degré plus ou moins élevé. Ce qui me fait dire qu’on ne naît pas intègre, mais qu’on peut le devenir. On le devient à force de nos choix, de nos ambitions, de la vision de l’existence qu’on nourrit. Tous ces choix ont un coût. Un jour où l’autre, nous savons que nous pouvons nous retrouver dans la position du lanceur d’alerte, pour une petite chose ou pour une plus grande. Un jour où l’autre, notre sincérité et notre honnêteté sont mises à l’épreuve de nos doutes, de nos envies, de la pression qu’exercent sur nous des personnes ou un milieu. Un jour ou l’autre, il cesse d’être facile de ne pas voler, de ne pas mentir, de ne pas tromper…
Nous pouvons tous, chrétiens ou pas, être tentés de dévier de la belle ligne claire et droite que nous nous étions fixée. Pour tenir le cap, il faut une motivation aussi forte que la pression exercée sur nous… Quelle cause peut être assez juste pour que nous persévérions ? Quel Dieu peut être assez grand pour nous inspirer un chemin de résistance ? L’apôtre Paul écrit dans sa lettre aux membres de l’église de Rome qu’une fois qu’on a accepté Jésus pour sauveur, on devient « esclave de la justice ». Comme si nous ne pouvons être autrement qu’intègres ! C’est un étrange esclavage. Mais j’aime à penser ce lien de cause à effet entre ma foi et mon intégrité comme le sens même de mon engagement avec Dieu : cet engagement me fait grandir, il exigeant mais il est constructif, et il plante en moi de bonnes graines qui ne peuvent faire autrement que de germer et de porter du fruit.