Seigneur donne-moi un signe
16 septembre 2018 - 59x
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Le mot « signe » revêt plusieurs sens qui ont tous en commun le caractère visible (parfois même spectaculaire) de la chose. Dans le domaine de la foi (rappelons que l’origine du mot est la même que pour « confiance »), dans le domaine de la relation avec Dieu, donc, on a aussi besoin de phénomènes visibles, tangibles. Ils permettent de lever les doutes et d’être vraiment au clair au moment de prendre une décision ou de se lancer dans un projet. Il faut croire que sur le principe, cela ne pose pas de problème à Dieu puisque plusieurs récits bibliques racontent comment Moïse, Gédéon, Marie… ont reçu des signes.
On a envie d’en conclure qu’on peut demander des signes à Dieu comme on se sert devant un buffet « à volonté ». Cela nous rassurerait. Car en effet, les signes sont probablement demandés, plébiscités, exigés dans la mesure où ils nous rassurent. Ils nous rassurent parce que nous les considérons comme indiscutables. Et moins nous avons confiance en nous, plus nous avons besoins de « preuves ». Surtout dans les moments difficiles, les moments de crise, les moments de panique, où nous cherchons naturellement ce qui nous sécurise. Malheureusement – ou heureusement, à vous de voir – la situation de l’être humain par rapport à Dieu est beaucoup plus complexe. D’ailleurs, qui peut se targuer d’avoir reçu sinon tous les signes demandés, du moins beaucoup de signes ?
Ses disciples eux-mêmes demandent au Christ des signes alors qu’ils ont assisté à ses miracles. Quel signe de plus leur faut-il donc ? Lequel leur suffira ? A partir de combien s’estimeront-ils rassurés ? De signe supplémentaire, ils n’en auront pas parce que leur maître sait bien que cela ne changerait rien. Pire : cela ne ferait que nourrir leur soif de spectaculaire et donc leur fragilité, leur manque d’assurance personnel et dans la foi.
Demander un signe, dans un contexte comme celui-là, c’est faire l’économie de la confiance. C’est se faciliter la vie : un signe, c’est visible, on ne peut pas le rater (ou alors c’est de la faute de celui qui l’envoie et qui fait mal son travail). Donc en attendant, sachant qu’un signe va arriver, je peux me reposer un peu. Attendre une réponse, dont je ne sais pas ce qu’elle sera, ni quand elle sera, quelle forme elle prendra, est nettement plus inconfortable. Cette posture oblige à rester en veille, disponible, réceptif, les antennes en alerte, cherchant à tout instant à être ouvert à ce que Dieu va dire car je ne sais pas où et quand la réponse peut me parvenir.
Pour recevoir un signe, il faut paradoxalement être dans une forme active d’écoute, avec des récepteurs qui fonctionnent parfaitement bien. S’il y a de la friture sur la ligne, on n’est même pas certain de reconnaître la voix d’un ami cher. Imaginez ce que ce serait avec Dieu !
En guise de conclusion, je serais tentée de dire : les signes, c’est bien, ce n’est pas interdit, mais si on peut s’en passer, autant avancer autrement. Dieu a en sa possession beaucoup d’autres moyens de nous délivrer ses messages. Laissons-le choisir le langage le plus adapté à nous.